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Quelques précisions sur le mysticisme

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Quelques précisions sur le mysticisme Empty Quelques précisions sur le mysticisme

Message par Ligeia Lun 15 Mar - 16:00

Présentation :


L’occasion se présente de faire un point sur ce qu’on appelle la « voie mystique » et les nombreuses incompréhensions voire même les erreurs qu’elle suscite.

Comme d’habitude, je me réfèrerai le plus possibles à des extraits tirés de l’enseignement de Guénon car mon interprétation personnelle n’a strictement aucun intérêt ni aucune légitimité à apparaître.
Les erreurs plus ou moins volontaires qui pullulent sur cette question sont déjà bien assez répandues sans qu’il y ait besoin d’un énième « avis » (le mien) ni besoin de polémiquer sur le sujet.
Il n’y a qu’à LIRE car tout a été dit.

Par ailleurs, pour être tout à fait conforme à la vérité, je dois préciser que Guénon mentionne bien le cas d’une « auto-réalisation », celle de Sri Ramana Maharshi. Mais RG avertit aussi que cela n’a rien en commun avec le mysticisme et il ajoutera de façon à n’entretenir aucune équivoque :


  • « On ne saurait trop insister là-dessus, et encore, malgré cela, il n’est peut-être pas entièrement sans danger de parler de cette possibilité, parce que trop de gens peuvent avoir tendance à s’illusionner à cet égard ; il suffira qu’il survienne dans leur existence un événement quelque peu extraordinaire, ou paraissant tel à leurs propres yeux, mais d’ailleurs d’un genre quelconque, pour qu’ils l’interprètent comme un signe qu’ils ont reçu cette initiation exceptionnelle ; et les Occidentaux actuels, en particulier, ne seront que trop facilement tentés de saisir le moindre prétexte de cette sorte pour se dispenser d’un rattachement régulier ; c’est pourquoi il convient d’insister tout spécialement sur ce que, tant que celui-ci n’est pas impossible à obtenir en fait, il n’y a pas a compter qu’on puisse, en dehors de lui, recevoir une initiation quelconque.
    (...) mais, de toute façon, il y a nécessairement là un contact réel, ce qui n’a assurément rien de commun avec des « visions » ou des rêveries qui ne relèvent guère que de l’imagination. (...) il s’agit donc là d’un fait parfaitement « positif », et non pas simplement d’un « signe » plus ou moins vague et équivoque, que chacun peut interpréter au gré de ses désirs. »




  • « Mais ce qu’il faut surtout éviter, car c’est là un danger qui est toujours à craindre quand on envisage des exceptions comme celles-là, c’est que certains ne puissent s’imaginer trop facilement qu’un tel cas est le leur, soit parce qu’ils se sentent naturellement portés à rechercher l’initiation, ce qui, le plus souvent, indique seulement qu’ils sont prêts à entrer dans cette voie, et non pas qu’ils l’ont déjà parcouru en partie dans un autre état, soit parce que, avant toute initiation, il leur est arrivé d’avoir quelques « lueurs » plus ou moins vagues, d’ordre probablement plus psychique que spirituel, qui n’ont en somme rien de plus extraordinaire et ne prouvent pas davantage que les « prémonitions » quelconques que peut avoir occasionnellement tout homme dont les facultés sont un peu moins étroitement limitées que ne le sont communément celles de l’humanité actuelle, et qui, par là même, se trouve moins exclusivement enfermé dans la seule modalité corporelle de son individualité, ce qui d’ailleurs, d’une façon générale, n’implique même pas nécessairement qu’il soit vraiment qualifié pour l’initiation.
    Tout cela ne représente assurément que des raisons tout à fait insuffisantes pour prétendre pouvoir se passer d’un Maître spirituel et arriver néanmoins sûrement à l’initiation effective, non moins que pour se dispenser de tout effort personnel en vue de ce résultat ; la vérité oblige à dire que c’est là une possibilité qui existe, mais aussi qu’elle ne peut appartenir qu’à une infime minorité, si bien qu’en somme il n’y a pas à en tenir compte pratiquement. Ceux qui ont réellement cette possibilité en prendront toujours conscience, au moment voulu, d’une façon certaine et indubitable, et c’est là, au fond la seule chose qui importe ; quand aux autres, leurs vaines imaginations, s’ils se laissaient entraîner à y ajouter foi et à se comporter en conséquence, ne pourraient que les conduire aux plus fâcheuses déceptions. » Initiation et réalisation spirituelle, chapitres V et XXII.



Le charabia mystico-religieux utilisé par certains ne sert qu’à masquer (sous le prétexte que leurs expérimentations sont « intraduisibles ») leurs incompétences en ce domaine quel que soit ce qu’ils  prétendent avoir « réalisé ».

Que beaucoup se limite à une forme traditionnelle et même, dans le cas du mysticisme qui nous occupe ici, à une particularité de cette tradition (« particularité occidentale et même spécifiquement chrétienne » notera Guénon), cela est légitime et normal à notre époque. Mais ce qui ne l’est plus, c’est de prétendre que leur « point de vue » limité constitue la Vérité même et qu’il n’y a rien « au-delà ».

On touche de près ici aux illusions trompeuses que propagera l’Antéchrist en faisant croire que seul le « plan horizontal » doit nous préoccuper, c’est-à-dire le « moi » individuel développé dans toute son étendue et pris pour le but final. C’est la négation de toute verticalité « ascendante » au-delà de l’individualité, et par là même celles de l’ésotérisme et de l’initiation. L’étape suivante et logique de cette subversion, c’est d’emprunter « la voie infernale », verticalité certes, mais descendante.
Il s’agit selon moi, de « la tentation de l’ampleur » mentionnée par Ibn Arabî et illustrée par le cas de Pharaon, en lien avec ce que Guénon signifie par cette phrase :


  • "On peut aussi se souvenir à ce propos du symbolisme de la « porte étroite », qui ne peut être franchie par celui qui, comme les « riches » dont il est question dans l’Évangile, n’a pas su se dépouiller des contingences, ou qui, « ayant voulu sauver son âme (c’est-à-dire le "moi"), la perd » parce qu’il ne peut, dans ces conditions, s’unir effectivement au principe permanent et immuable de son être."


Mais ceci est un autre sujet développé ici : [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]
Je ne le mentionne que pour montrer à quelle dangereuse extrémité peut conduire cette tendance actuelle à confondre mysticisme et initiation, exotérisme et ésotérisme.  

« Toutes choses paraissent si simples à celui qui ne connaît rien ! »
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Message par Ligeia Lun 15 Mar - 19:37

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RG dans les « Aperçus sur l’initiation » :


Dans le chapitre I :

« La confusion entre le domaine ésotérique et initiatique et le domaine mystique, ou, si l’on préfère, entre les points de vue qui leur correspondent respectivement, est une de celles que l’on commet le plus fréquemment aujourd’hui, et cela, semble-t-il, d’une façon qui n’est pas toujours entièrement désintéressée ; il y a là, du reste, une attitude assez nouvelle, ou qui du moins, dans certains milieux, s’est beaucoup généralisée en ces dernières années, et c’est pourquoi il nous paraît nécessaire de commencer par nous expliquer nettement sur ce point.

Il est maintenant de mode, si l’on peut dire, de qualifier de « mystiques » les doctrines orientales elles-mêmes, y compris celles où il n’y a pas même l’ombre d’une apparence extérieure pouvant, pour ceux qui ne vont pas plus loin, donner lieu à une telle qualification ; l’origine de cette fausse interprétation est naturellement imputable à certains orientalistes, qui peuvent d’ailleurs n’y avoir pas été amenés tout d’abord par une arrière-pensée nettement définie, mais seulement par leur incompréhension et par le parti pris plus ou moins inconscient, qui leur est habituel, de tout ramener à des points de vue occidentaux  (1).
Mais d’autres sont venus ensuite, qui se sont emparés de cette assimilation abusive, et qui, voyant le parti qu’ils pourraient en tirer pour leurs propres fins, s’efforcent d’en propager l’idée en dehors du monde spécial, et somme toute assez restreint, des orientalistes et de leur clientèle ; et ceci est plus grave, non pas seulement parce que c’est par là surtout que cette confusion se répand de plus en plus, mais aussi parce qu’il n’est pas difficile d’y apercevoir des marques non équivoques d’une tentative « annexionniste » contre laquelle il importe de se tenir sur ses gardes.

1 C’est ainsi que, spécialement depuis que l’orientaliste anglais Nicholson s’est avisé de traduire taçawwuf par mysticisme, il est convenu en Occident que l’ésotérisme islamique est quelque chose d’essentiellement « mystique » ; et même, dans ce cas, on ne parle plus du tout d’ésotérisme, mais uniquement de mysticisme, c’est-à-dire qu’on en est arrivé à une véritable substitution de points de vue. Le plus beau est que, sur des questions de cet ordre, l’opinion des orientalistes, qui ne connaissent ces choses que par les livres, compte manifestement beaucoup plus, aux yeux de l’immense majorité des Occidentaux, que l’avis de ceux qui en ont une connaissance directe et effective !

En effet, ceux auxquels nous faisons allusion ici sont ceux que l’on peut regarder comme les négateurs les plus « sérieux » de l’ésotérisme, nous voulons dire par là les exotéristes religieux qui se refusent à admettre quoi que ce soit au delà de leur propre domaine, mais qui estiment sans doute cette assimilation ou cette « annexion » plus habile qu’une négation brutale ; et, à voir de quelle manière certains d’entre eux s’appliquent à travestir en « mysticisme » les doctrines les plus nettement initiatiques, il semblerait vraiment que cette tâche revête à leurs yeux un caractère tout particulièrement urgent.

A vrai dire, il y aurait pourtant, dans ce même domaine religieux auquel appartient le mysticisme, quelque chose qui, à certains égards, pourrait mieux se prêter à un rapprochement, on plutôt à une apparence de rapprochement : c’est ce qu’on désigne par le terme d’« ascétique », car il y a là tout au moins une méthode « active », au lieu de l’absence de méthode et de la « passivité » qui caractérisent le mysticisme et sur lesquelles nous aurons à revenir tout à l’heure (2) ; mais il va de soi que ces similitudes sont tout extérieures, et, d’autre part, cette « ascétique » n’a peut-être que des buts trop visiblement limités pour pouvoir être avantageusement utilisée de cette façon, tandis que, avec le mysticisme, on ne sait jamais très exactement où l’on va, et ce vague même est assurément propice aux confusions.
Seulement, ceux qui se livrent à ce travail de propos délibéré, non plus que ceux qui les suivent plus ou moins inconsciemment, ne paraissent pas se douter que, dans tout ce qui se rapporte à l’initiation, il n’y a en réalité rien de vague ni de nébuleux, mais au contraire des choses très précises et très « positives » ; et, en fait, l’initiation est, par sa nature même, proprement incompatible avec le mysticisme.
Cette incompatibilité ne résulte pas, d’ailleurs, de ce qu’implique originellement le mot « mysticisme » lui-même, qui est même manifestement apparenté à l’ancienne désignation des « mystères », c’est-à-dire de quelque chose qui appartient au contraire à l’ordre initiatique ; mais ce mot est de ceux pour lesquels, loin de pouvoir s’en rapporter uniquement à l’étymologie, on est rigoureusement obligé, si l’on veut se faire comprendre, de tenir compte du sens qui leur a été imposé par l’usage, et qui est, en fait, le seul qui s’y attache actuellement.
Or chacun sait ce qu’on entend par « mysticisme », depuis bien des siècles déjà, de sorte qu’il n’est plus possible d’employer ce terme pour désigner autre chose ; et c’est cela qui, disons-nous, n’a et ne peut avoir rien de commun avec l’initiation, d’abord parce que ce mysticisme relève exclusivement du domaine religieux, c’est-à-dire exotérique, et ensuite parce que la voie mystique diffère de la voie initiatique par tous ses caractères essentiels, et que cette différence est telle qu’il en résulte entre elles une véritable incompatibilité.

Précisons d’ailleurs qu’il s’agit en cela d’une incompatibilité de fait plutôt que de principe, en ce sens qu’il ne s’agit aucunement pour nous de nier la valeur au moins relative du mysticisme, ni de lui contester la place qui peut légitimement lui appartenir dans certaines formes traditionnelles ; la voie initiatique et la voie mystique peuvent donc parfaitement coexister (3), mais ce que nous voulons dire, c’est qu’il est impossible que quelqu’un suive à la fois l’une et l’autre, et cela même sans rien préjuger du but auquel elles peuvent conduire, bien que du reste on puisse déjà pressentir, en raison de la différence profonde des domaines auxquels elles se rapportent, que ce but ne saurait être le même en réalité.

2 Nous pouvons citer, comme exemple d’« ascétique », les Exercices spirituels de saint Ignace de Loyola, dont l’esprit est incontestablement aussi peu mystique que possible, et pour lesquels il est au moins vraisemblable qu’il s’est inspiré en partie de certaines méthodes initiatiques, d’origine islamique, mais, bien entendu, en les appliquant à un but entièrement différent.
3 Il Pourrait être intéressant, à cet égard, de faire une comparaison avec la « voie sèche » et la « voie humide » des alchimistes, mais ceci sortirait du cadre de la présente étude.


Nous avons dit que la confusion qui fait voir à certains du mysticisme là où il n’y en a pas la moindre trace a son point de départ dans la tendance à tout réduire aux points de vue occidentaux ; c’est que, en effet, le mysticisme proprement dit est quelque chose d’exclusivement occidental et, au fond, de spécifiquement chrétien. »

« Nous ne nous proposons point présentement d’exposer en détail et d’une façon complète toutes les différences qui séparent en réalité les deux points de vue initiatique et mystique, car cela seul demanderait tout un volume ; notre intention est surtout d’insister ici sur la différence en vertu de laquelle l’initiation, dans son processus même, présente des caractères tout autres que ceux du mysticisme, voire même opposés, ce qui suffit à montrer qu’il y a bien là deux « voies » non seulement distinctes, mais incompatibles dans le sens que nous avons déjà précisé.
Ce qu’on dit le plus souvent à cet égard, c’est que le mysticisme est « passif », tandis que l’initiation est « active » ; cela est d’ailleurs très vrai, à la condition de bien déterminer l’acception dans laquelle on doit l’entendre, exactement.
Cela signifie surtout que, dans le cas du mysticisme, l’individu se borne à recevoir simplement ce qui se présente à lui, et tel qu’il se présente, sans que lui-même y soit pour rien ; et, disons-le tout de suite, c’est en cela que réside pour lui le danger principal, du fait qu’il est ainsi « ouvert » à toutes les influences, de quelque ordre qu’elles soient, et qu’au surplus, en général et sauf de rares exceptions, il n’a pas la préparation doctrinale qui serait nécessaire pour lui permettre d’établir entre elles une discrimination quelconque (2).

2 - C’est aussi ce caractère de « passivité » qui explique, s’il ne les justifie nullement, les erreurs modernes qui tendent à confondre les mystiques, soit avec les médiums et autres « sensitifs », au sens que les « psychistes » donnent à ce mot, soit même avec de simples malades.

Dans le cas de l’initiation, au contraire, c’est à l’individu qu’appartient l’initiative d’une « réalisation » qui se poursuivra méthodiquement, sous un contrôle rigoureux et incessant, et qui devra normalement aboutir à dépasser les possibilités mêmes de l’individu comme tel ; il est indispensable d’ajouter que cette initiative ne suffit pas, car il est bien évident que l’individu ne saurait se dépasser lui-même par ses propres moyens, mais, et c’est là ce qui nous importe pour le moment, c’est elle qui constitue obligatoirement le point de départ de toute « réalisation » pour l’initié, tandis que le mystique n’en a aucune, même pour des choses qui ne vont nullement au delà du domaine des possibilités individuelles. »

Chapitre II :

« De là vient aussi, d’autre part, que le mystique, presque toujours, est trop facilement dupe de son imagination, dont les productions, sans qu’il s’en doute, viennent souvent se mêler aux résultats réels de ses « expériences » d’une façon à peu près inextricable. Pour cette raison, il ne faut pas s’exagérer l’importance des « révélations » des mystiques, ou, du moins, on ne peut jamais les accepter sans contrôle (12)  ; ; ce qui fait tout l’intérêt de certaines visions, c’est qu’elles sont en accord, sur de nombreux points, avec des données traditionnelles évidemment ignorées du mystique qui a eu ces visions (13) ; mais ce serait une erreur, et même un renversement des rapports normaux, que de vouloir trouver là une « confirmation » de ces données, qui n’en ont d’ailleurs nullement besoin, et qui sont, au contraire, la seule garantie qu’il y a réellement dans les visions en question autre chose qu’un simple produit de l’imagination ou de la fantaisie individuelle.

12 Cette attitude de réserve prudente, qui s’impose en raison de la tendance naturelle des mystiques à la « divagation » au sens propre de ce mot, est d’ailleurs celle que le Catholicisme observe invariablement à leur égard.
13 On peut citer ici comme exemple les visions d’Anne-Catherine Emmerich.
»

Chapitre III :

« Pour exprimer la chose d’une manière qui sera peut-être plus aisément compréhensible, nous dirons que, si par exemple quelqu’un peut entrer en rapport avec les anges, sans cesser pour cela d’être lui-même enfermé dans sa condition d’individu humain, il n’en sera pas plus avancé au point de vue initiatique ; il ne s’agit pas ici de communiquer avec d’autres êtres qui sont dans un état « angélique », mais d’atteindre et de réaliser soi-même un tel état supra-individuel, non pas, bien entendu, en tant qu’individu humain, ce qui serait évidemment absurde, mais en tant que l’être qui se manifeste comme individu humain dans un certain état a aussi en lui les possibilités de tous les autres états. Toute réalisation initiatique est donc essentiellement et purement « intérieure », au contraire de cette « sortie de soi » qui constitue l’« extase » au sens propre et étymologique de ce mot ; et là est, non pas certes la seule différence, mais du moins une des grandes différences qui existent entre les états mystiques, lesquels appartiennent entièrement au domaine religieux, et les états initiatiques.
C’est là, en effet, qu’il faut toujours en revenir en définitive, car la confusion du point de vue initiatique avec le point de vue mystique, dont nous avons tenu à souligner dès le début le caractère particulièrement insidieux, est de nature à tromper des esprits qui ne se laisseraient point prendre aux déformations plus grossières des pseudo-initiations modernes, et qui même pourraient peut-être arriver sans trop de difficulté à comprendre ce qu’est vraiment l’initiation, s’ils ne rencontraient sur leur route ces erreurs subtiles qui semblent bien y être mises tout exprès pour les détourner d’une telle compréhension. »

Chapitre XV :

« L’initiation, en effet, n’est pas, comme les réalisations mystiques, quelque chose qui tombe d’au delà des nuages, si l’on peut dire, sans qu’on sache comment ni pourquoi ; elle repose au contraire sur des lois scientifiques positives et sur des règles techniques rigoureuses ; on ne saurait trop insister là-dessus, chaque fois que l’occasion sen présente, pour écarter toute possibilité de malentendu sur sa véritable nature. »

« (...)  toute religion se propose uniquement d’assurer le « salut » de ses adhérents, ce qui est une finalité relevant encore de l’ordre individuel, et, par définition en quelque sorte, son point de vue ne s’étend pas au delà ; les mystiques eux-mêmes n’envisagent toujours que le « salut » et jamais la « Délivrance », tandis que celle-ci est, au contraire, le but dernier et suprême de toute initiation. »

« Un autre point d’une importance capitale est le suivant : l’initiation, à quelque degré que ce soit, représente pour l’être qui l’a reçue une acquisition permanente, un état que, virtuellement ou effectivement, il a atteint une fois pour toutes, et que rien désormais ne saurait lui enlever. Nous pouvons remarquer qu’il y a là encore une différence très nette avec les états mystiques, qui apparaissent comme quelque chose de passager et même de fugitif, dont l’être sort comme il y est entré, et qu’il peut même ne jamais retrouver, ce qui s’explique par le caractère « phénoménique » de ces états, reçus du dehors, en quelque sorte, au lieu de procéder de l’« intériorité » même de l’être (108 ).
108 Ceci touche à la question de la « dualité » que maintient nécessairement le point de vue religieux, par là même qu’il se rapporte essentiellement à ce que la terminologie hindoue désigne comme le « Non-Suprême ».

Chapitre XVII :


« D’autre part, ce qui montre encore le destin vraiment singulier de certains mots, c’est qu’un autre terme étroitement apparenté à ceux que nous venons de mentionner est, comme nous l’avons d’ailleurs indiqué déjà, celui de « mystique », qui, étymologiquement, s’applique à tout ce qui concerne les mystères : mustikos, en effet, est l’adjectif de mustês, initié ; il équivaut donc originairement à « initiatique » et désigne tout ce qui se rapporte à l’initiation, à sa doctrine et à son objet même (mais dans ce sens ancien, il ne peut jamais être appliqué à des personnes) ; or, chez les modernes, ce même mot « mystique », seul parmi tous ces termes de souche commune, en est arrivé à désigner exclusivement quelque chose qui, comme nous l’avons vu, n’a absolument rien de commun avec l’initiation, et qui a même des caractères opposés à certains égards. »

Chapitre XXXII :

« C’est d’ailleurs pourquoi, même en dehors du point de vue initiatique, les simples mystiques, sans dépasser les limites du domaine individuel, sont cependant, dans leur ordre qui est celui de la tradition exotérique, incontestablement supérieurs non seulement aux philosophes, mais même aux théologiens, car la moindre parcelle de connaissance effective vaut incomparablement plus que tous les raisonnements qui ne procèdent que du mental (204).
204 - Nous devons préciser que cette supériorité des mystiques doit s’entendre exclusivement quant à leur état intérieur, car, d’un autre côté, il peut arriver, comme nous l’avons déjà indiqué plus haut, que, faute de préparation théorique, ils soient incapables d’en exprimer quoi que ce soit d’une façon intelligible ; et, en outre, il faut tenir compte du fait que, en dépit de ce qu’ils ont vraiment « réalisé », ils risquent toujours de s’égarer, par la même qu’ils ne peuvent dépasser les possibilités de l’ordre individuel. »


A suivre.

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Message par Ligeia Mar 16 Mar - 8:31

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La Gnose, janvier 1911, article signé Palingenius :


« Et tout d’abord, au bas et en dehors de cette hiérarchie, il faut mettre la foule des profanes, c’est-à-dire de tous ceux qui, comme les simples croyants des religions, ne peuvent obtenir de résultats que par rapport à leur individualité corporelle, et dans ces limites de cette portion d’individualité, puisque leur conscience ne va ni plus loin ni plus haut que le domaine renfermé dans des limites restreintes.
Pourtant, parmi ces croyants, il en est, en petit nombre d’ailleurs, qui acquièrent quelque chose de plus (et c’est là le cas de certains mystiques, que l’on pourrait considérer en ce sens comme plus « intellectuels » que les autres) : sans sortir de leur individualité, mais dans des « prolongements » de celle-ci, ils perçoivent indirectement certaines réalités d’ordre supérieur, non pas telles qu’elles sont en elles-mêmes, mais traduites symboliquement et revêtues de formes psychiques ou mentales. Ce sont encore là des phénomènes (c’est-à-dire, au sens étymologique, des apparences, toujours relatives et illusoires en tant que formelles), mais des phénomènes suprasensibles, qui ne sont pas constatables pour tous, et qui peuvent entraîner chez ceux qui les perçoivent quelques certitudes, toujours incomplètes, fragmentaires et dispersées, mais pourtant supérieures à la croyance pure et simple à laquelle elles se substituent ; ce résultat s’obtient d’ailleurs passivement, c’est-à-dire sans intervention de la volonté, et par les moyens ordinaires qu’indiquent les religions, en particulier par la prière et l’accomplissement des œuvres prescrites, car tout cela ne sort pas encore du domaine de l’exotérisme.

À un degré plus élevé se placent ceux qui, ayant étendu leur conscience jusqu’aux limites extrêmes de l’individualité intégrale, arrivent à percevoir directement les états supérieurs de leur être, mais sans y participer effectivement ; c’est là une initiation réelle, mais encore toute théorique, puisqu’elle n’aboutit pas à la possession de ces états supérieurs. Elle produit des certitudes plus complètes et plus développées que la précédente, car elle n’appartient plus au domaine phénoménique ; mais, ici encore, ces certitudes ne sont reçues qu’au gré des circonstances, et non par un effet de la volonté consciente de celui qui les acquiert. Celui-ci peut donc être comparé à un homme qui ne connaît la lumière que par les rayons qui parviennent jusqu’à lui (dans le cas précédent, il ne la connaissait que par des reflets, ou des ombres projetées dans le champ de sa conscience individuelle restreinte, comme les prisonniers de la caverne symbolique de Platon), tandis que, pour connaître parfaitement la lumière dans sa « réalité intime », il faut remonter jusqu’à sa source, et s’identifier avec cette source même.

Ce dernier cas est celui qui correspond à la plénitude de l’initiation réelle et effective, c’est-à-dire à la prise de possession consciente et volontaire de la totalité des états de l’être, selon les deux sens que nous avons indiqués. C’est là le résultat complet et final de l’incantation, bien différent, comme l’on voit, de tous ceux que les mystiques peuvent atteindre par la prière, car il n’est pas autre chose que la compréhension et la certitude parfaites, impliquant la connaissance métaphysique intégrale. Le Yogi véritable est celui qui est parvenu à ce degré suprême, et qui a ainsi réalisé dans son être la totale possibilité de l’Homme Universel. »


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RG dans « Initiation et réalisations spirituelle » :


Chapitre VIII :

« C’est ainsi que, quand les mystiques parlent d’« union à Dieu », ce qu’ils entendent par là n’est certainement en aucune façon assimilable au Yoga ; et cette remarque est particulièrement importante, parce que certains seraient peut-être tentés de dire : comment pourrait-il y avoir pour un être une finalité plus haute que l’union à Dieu ?
Tout dépend du sens dans lequel on prend le mot « union » ; en réalité, les mystiques, comme tous les autres exotéristes, ne sont jamais préoccupés de rien de plus ni d’autre que du salut, bien que ce qu’ils ont en vue soit, si l’on veut, une modalité supérieure du salut, car il serait inconcevable qu’il n’y ait pas aussi une hiérarchie parmi les êtres « sauvés ». En tout cas, l’union mystique, laissant subsister l’individualité comme telle, ne peut être qu’une union tout extérieure et relative, et il est bien évident que les mystiques n’ont jamais conçu même la possibilité de l’Identité Suprême ; ils s’arrêtent à la « vision », et toute l’étendue des mondes angéliques les sépare encore de la Délivrance. »

Chapitre XIV :

« Nous avons eu à signaler, il y a quelques années, l’étrange attitude de ceux qui éprouvaient le besoin de confondre délibérément l’ésotérisme avec le mysticisme ou même, pour parler plus exactement, d’exposer les choses de façon à substituer entièrement le mysticisme à l’ésotérisme partout où ils rencontraient celui-ci, et notamment dans les doctrines orientales. »

Chapitre XVI :

« Il n’y a de contemplation mystique proprement dite que dans le cas de ce qui est appelé « vision intellectuelle », qui est d’un ordre beaucoup plus « intérieur », et à laquelle n’atteignent que les mystiques qu’on peut dire supérieurs, à tel point qu’il semble que ce soit là en quelque sorte l’aboutissement et comme le but même de leur réalisation ; mais ces mystiques dépassent-ils effectivement par là le domaine individuel ? C’est en cela que consiste au fond toute la question, car c’est cela seul qui, tout en laissant d’ailleurs subsister en tout cas la différence des moyens caractérisant respectivement les deux voies initiatique et mystique, pourrait justifier, quant à leur but, une certaine assimilation comme celle dont nous venons de parler. Il est bien entendu qu’il ne s’agit aucunement pour nous d’amoindrir la portée des différences qualificatives qui existent dans le mysticisme lui-même ; mais il n’en est pas moins vrai que, même pour ce qu’il y a de plus élevé dans celui-ci, cette assimilation impliquerait une confusion qu’il est nécessaire de dissiper. (...)

Mais la passivité du mystique consiste proprement en ce qu’il se borne à recevoir ce qui vient à lui, et qui ne peut pas ne pas éveiller en lui une certaine activité intérieure, celle-là même qui constituera précisément sa contemplation ; il est passif parce qu’il ne fait rien pour aller au-devant des réalités qui sont l’objet de cette contemplation, et c’est cela même qui entraîne comme conséquence qu’il ne sort pas de son état individuel. Il faut donc, pour que ces réalités lui deviennent accessibles en quelque façon, qu’elles descendent pour ainsi dire dans le domaine individuel, ou, si l’on préfère, qu’elles s’y reflètent comme nous le disions tout à l’heure ; cette dernière façon de parler est d’ailleurs la plus exacte, parce qu’elle fait mieux comprendre qu’elles ne sont aucunement affectées par cette « descente » apparente, pas plus que le soleil ne l’est par l’existence de son reflet. (...)
Dans le mysticisme, insistons-y encore, il n’est jamais question d’identification avec le Principe, ni même avec tel ou tel de ses aspects « non suprêmes » (ce qui en tout cas dépasserait encore manifestement les possibilités d’ordre individuel) ; et, de plus, l’union qui est considérée comme le terme même de la vie mystique est toujours rapportée à une manifestation principielle envisagée uniquement dans le domaine humain ou par rapport à celui-ci. »

Chapitre XXXII :

« Il n’y a donc là rien de comparable à ce qui se produit dans le cas des « états mystiques » passagers, tels que l’« extase », après lesquels l’être se retrouve purement et simplement dans l’existence humaine terrestre, avec toutes les limitations individuelles qui la conditionnent, ne gardant de ces états, dans sa conscience actuelle, qu’un reflet indirect et toujours plus ou moins imparfait. »


A suivre.

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Message par Ligeia Mer 17 Mar - 11:45

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RG dans «L’erreur spirite » :

Chapitre XI :

« Lorsque les "voyants" sont des mystiques orthodoxes, leurs tendances naturelles à la divagation se trouvent en quelque sorte comprimées et réduites au minimum ; presque partout ailleurs, elles se donnent libre cours, et le résultat en est souvent un fouillis à peu près inextricable ; les "voyants" les plus incontestables et les plus célèbres, comme Swedenborg par exemple, sont loin d’être exempts de ce défaut, et l’on ne saurait prendre trop de précautions si l’on veut dégager ce que leurs œuvres peuvent contenir de réellement intéressant ; encore vaut-il mieux recourir à des sources plus pures, car, après tout, il n’y a rien chez eux qui ne puisse se retrouver ailleurs, dans un état moins chaotique et sous des formes plus intelligibles. »


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Dans « APERÇUS SUR L’ÉSOTÉRISME ISLAMIQUE ET LE TAOÏSME » :

Chapitre I :

« D'autre part, le mystique, ayant une attitude "passive" et se bornant par conséquent à recevoir ce qui vient à lui en quelque sorte spontanément et sans aucune initiative de sa part, ne saurait avoir de méthode ; il ne peut donc pas y avoir de tarîqah mystique, et une telle chose est même inconcevable, car elle est contradictoire au fond.
De plus, le mystique, étant toujours un isolé, et cela par le fait même du caractère "passif" de sa "réalisation", n’a ni sheikh ou "maître spirituel" (ce qui, bien entendu, n’a absolument rien de commun avec un "directeur de conscience" au sens religieux), ni silsilah ou "chaîne" par laquelle lui serait transmise une « influence spirituelle » (nous employons cette expression pour rendre aussi exactement que possible la signification du mot arabe barakah), la seconde de ces deux choses étant d’ailleurs une conséquence immédiate de la première.

La transmission régulière de l’« influence spirituelle » est ce qui caractérise essentiellement l’« initiation », et même ce qui la constitue proprement, et c’est pourquoi nous avons employé ce mot plus haut pour traduire taçawwuf ; l’ésotérisme islamique, comme du reste tout véritable ésotérisme, est "initiatique" et ne peut être autre chose ; et, sans même entrer dans la question de la différence des buts, différence qui résulte d’ailleurs de celle même des deux domaines auxquels ils se réfèrent, nous pouvons dire que la "voie mystique" et la "voie initiatique" sont radicalement incompatibles en raison de leurs caractères respectifs.

Faut-il ajouter encore qu’il n’y a en arabe aucun mot par lequel on puisse traduire même approximativement celui de "mysticisme", tellement l’idée que celui-ci exprime représente quelque chose de complètement étranger à la tradition islamique ? »


FIN.

*******


En espérant que tous ces extraits auront permis de clarifier les choses.  Wink
Ligeia
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