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Quelques remarques sur le Prophète

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Message par Ligeia Mer 19 Aoû - 15:57

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René Guénon - Quelques remarques sur le Prophète



– REMARQUES GÉNÉRALES –


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Emblème d'Henri II


Aperçus sur l’Ésotérisme islamique et le Taoïsme, C.R. dans Voile d’Isis, 1933 :
« Par ailleurs, on retrouve dans ce roman tous les clichés plus ou moins ineptes qui ont cours dans le public européen, y compris le « Croissant » et l’« étendard vert du Prophète »…»

Lettre à Marcel Clavelle alias Jean Reyor, Le Caire, 2 septembre 1932 :
« ... Pour ce qui est des « prophéties occidentales » (j’aimerais mieux ne les appeler que « prédictions ») qui parlent d’une future « lutte de la Croix et du Croissant », j’avoue que je ne leur accorde qu’une valeur des plus relatives. D’abord, je ne vois pas du tout, dans l’état actuel du monde, quels peuples pourraient bien être qualifiés pour représenter la Croix ; ensuite le Croissant n’a jamais symbolisé l’Islam que dans l’imagination des Occidentaux, il ne lui appartient ni exclusivement ni essentiellement, et il y est uniquement un symbole de « majesté », rien de plus - Je vous signalerai à ce propos que le roi de France Henri II que je ne crois pas avoir été musulman, en avait fait son emblème personnel, et aussi qu’on voit ici sur beaucoup de boutiques Coptes donc chrétiennes, la Croix entre les cornes du croissant (ce qui reproduit d’ailleurs exactement un ancien symbole phénicien, bien antérieur à l’islam et au christianisme). - Mais il y a des « clichés » que l’ignorance se plait à répéter indéfiniment : c’est ainsi, pour prendre encore un autre exemple qu’il est convenu en Europe que l’étendard du Prophète était vert ; or il y en avait deux, un blanc pour la paix et un noir pour la guerre ; le vert n’est venu que beaucoup plus tard, sous je ne sais quel Khalife. »


Études sur la Franc-Maçonnerie et le Compagnonnage, tome 1, C.R. dans V.I. fév. 1932 :
« Signalons une étrange hypothèse d’après laquelle le Baphomet, dont le nom « ressemble à Mahomet » (on oublie que celui-ci n’est que la déformation de Mohammed), aurait été « la représentation du dieu même des Égyptiens, Sérapis-Hélios (voyez le Larousse), un corps d’homme avec une tête de taureau »… »

Lettre à P.G., Le Caire, 2 septembre 1936 :
« ... Dans la version arabe des Évangiles, la désignation du Paraclet est Ahmed, ce qui est le nom céleste du Prophète (Mohammed étant son nom terrestre, et Mahmûd son nom paradisiaque). A cause de cela, l’empereur Héraclius fut tout près de reconnaître la mission du Prophète ; il en fut seulement détourné par certains membres du clergé grec qui prétendirent qu’il y avait là une erreur d’interprétation. »

Lettre à Louis Cattiaux, Le Caire, 4 octobre 1950 :
« En fait, il n’y a que les livres sacrés des différentes traditions qui soient véritablement inspirés de Dieu, et il ne doit plus y avoir aucun Prophète jusqu’à la fin du cycle actuel, qui du reste n’est peut-être plus bien éloignée… »

Lettre à Marcel Clavelle alias Jean Reyor, Le Caire, 9 juillet 1937 :

« ... ici le dernier des ignorants sait qu’il (le Mahdi) doit être de race arabe et descendant du Prophète ; et puis le Mahdi ne doit pas du tout être un « nouveau Prophète » et le considérer comme tel est une énorme hérésie. »

Revue de philosophie, sept.-oct. 1921, C.R. du lire de Goldziher, Le Dogme et la Loi de l’Islam :

« I. Mohammed et l’Islam. – On connaît la thèse, chère à certains psychologues, et surtout aux médecins qui se mêlent de psychologie, de la « pathologie » des mystiques, des prophètes et des fondateurs de religions ; nous nous souvenons d’une application particulièrement répugnante qui en fut faite au Judaïsme et au Christianisme (1). Il y a ici quelque chose de la même tendance, bien que l’auteur y insiste moins que d’autres ne l’ont fait ; en tout cas, c’est l’esprit « rationaliste » qui domine dans ce chapitre. On y rencontre même fréquemment des phrases comme celle-ci : « Mohammed s’est fait révéler telle ou telle chose » ; cela est extrêmement déplaisant. L’« évolutionnisme » apparaît dans la distinction, on pourrait même dire l’opposition, que l’on veut établir entre la période de la Mekke et celle de Médine : de l’une à l’autre, il y aurait eu un changement, dû aux circonstances extérieures, dans le caractère prophétique de Mohammed ; nous ne croyons pas que ceux qui examinent les textes qorâniques sans idée préconçue puissent y trouver rien de semblable. D’autre part, la doctrine enseignée par Mohammed n’est pas du tout un « éclectisme » ; la vérité est qu’il s’est toujours présenté comme un continuateur de la tradition judéo-chrétienne, en se défendant expressément de vouloir instituer une religion nouvelle et même d’innover quoi que ce soit en fait de dogmes et de lois (et c’est pourquoi le mot « mahométan » est absolument rejeté par ses disciples). Ajoutons encore que le sens du mot Islam, qui est « soumission à la Volonté divine », n’est pas interprété d’une façon  parfaitement correcte, non plus que la conception de l’« universalité » religieuse chez Mohammed ; ces deux questions se tiennent d’ailleurs d’assez près. » Note : « (1) L’auteur auquel nous faisons allusion et son livre relatif au Christianisme furent, pendant la guerre, la cause d’incidents extrêmement fâcheux pour l`influence française en Orient (voir Mermeix, Le commandement unique : Sarrail et les armées d’Orient, pp. 31-33). »

Lettre à Hillel, Le Caire le 5 décembre 1933 :
« Il est exact que Rasûl signifie littéralement « envoyé », mais le mot Malak existe aussi en arabe avec le sens d’ « ange » (je pense que, en grec, il doit y avoir une certaine différence de sens entre apostolos et angelos, bien que les deux mots puissent se traduire par « envoyé ») ; et il peut y avoir des Rusul min el-malaïkah wa min en-nâs, c’est à dire d’entre les anges et d’entre les hommes. L’expression « ed-dîn el-hânif » désigne la religion d’Abraham ; justement il était question ici, il y a quelque temps, du sens de ce mot hânif, et on envisageait différentes significations, finalement on a été d’accord pour admettre celle que je donnais : hânif = tâher, c’est-à-dire « pur ». Les hunafâ sont donc littéralement les « purs » (comme les Cathares, ce qui est assez curieux) ; ce sont ceux d’entre les arabes qui avaient conservé intact la religion d’Abraham, car il y en a toujours eu jusqu’à l’Islam (certains ont pu être prophètes, mais non pas tous) ; et Mohammed lui-même, avant sa mission était hânif. »

Lettre à Louis Caudron d’Amiens, Le Caire, 22 mars 1936 :
« Pour votre question concernant la vie du Prophète, la conception la plus orthodoxe est que l’impeccabilité appartient réellement à tous les prophètes, de sorte que, si même il se trouve dans leurs actions quelque chose qui peut sembler choquant, cela même doit s’expliquer par des raisons qui dépassent le point de vue de l’humanité ordinaire (à un degré moindre, cela s’applique aussi aux actions de tous ceux qui ont atteint un certain degré d’initiation). D’un autre côté, la mission d’un rasûl, par là même qu’elle s’adresse à tous les hommes indistinctement, implique une façon d’agir où n’apparaissent pas les réalisations d’ordre ésotérique (ce qui constitue d’ailleurs une sorte de sacrifice pour celui qui est revêtu de cette mission). C’est pourquoi certains disent aussi que ce qui serait le plus intéressant au point de vue initiatique, s’il était possible de le connaître exactement, c’est la période de la vie de Mohammed antérieure à la risâlah (et ceci s’applique également à la « vie cachée » du Christ par rapport à sa « vie publique » : ces deux expressions, en elles-mêmes, s’accordent du reste tout à fait avec ce que je viens de dire et l’indiquent presque explicitement). II est d’ailleurs bien entendu que les considérations historiques n’ont pas d’intérêt en elles-mêmes, mais seulement par ce qu’elles traduisent de certaines vérités doctrinales. Enfin, on ne peut pas négliger, dans une tradition qui forme nécessairement un tout, ce qui ne concerne pas directement la réalisation métaphysique (et il y a de tels éléments dans la tradition hindoue comme dans les autres, puisqu’elle implique aussi, par exemple, une législation) ; il faut plutôt s’efforcer de le comprendre par rapport à cette réalisation, ce qui revient en somme à en rechercher le « sens intérieur ». »


– REMARQUES RELEVANT DE L’ÉSOTÉRISME –


Initiation et Réalisation spirituelle, chap. XXVIII - Le masque « populaire » :
« D’autre part, il est particulièrement important de remarquer que l’apparence « populaire » revêtue par les initiés constitue à tous les degrés, comme une image de la « réalisation descendante » ; c’est pourquoi l’état des Malâmatiyah est dit « ressembler à l’état du Prophète, lequel fut élevé aux plus hauts degrés de la Proximité divine », mais qui, « lorsqu’il revint vers les créatures, ne parla avec elles que des choses extérieures », de telle sorte que, « de son entretien intime avec Dieu, rien ne parut sur sa personne ». S’il est dit en outre que « cet état est supérieur à celui de Moïse, dont personne ne put regarder la figure après qu’il eut parlé avec Dieu », ceci se réfère encore à l’idée de la totalité, en vertu même de ce que nous expliquions tout à l’heure : c’est, au fond, une application de l’axiome suivant lequel « le tout est plus que la partie », quelle que soit d’ailleurs cette partie, et fût-elle même la plus éminente de toutes. Dans le cas représenté ici par l’état de Moïse, en effet, la « redescente » n’est pas complètement effectuée, pourrait-on dire, et n’englobe pas intégralement tous les niveaux inférieurs, jusqu’à celui que symbolise l’apparence extérieure des hommes vulgaires, pour les faire participer à la vérité transcendante dans la mesure de leurs possibilités respectives ; »

Lettre à Marcel Maugy alias Denys Roman, Le Caire, 19 octobre 1948 :
« Dans les LL∴ opératives, le nom d’El-shaddaï est expressément mentionné dans l’invocation prononcée à l’ouverture par le Chaplain (Bro∴ Jak∴) ; votre remarque sur le nombre 345 de ce nom est juste, mais il y a encore d’autres choses assez remarquables. Shaddaï seul a pour nombre 314, qui est important aussi ; c’est en même temps le nombre de Métatron, et de plus, en arabe, c’est le nombre du nom « développé » de Mohammed (le F∴ Maridort pourra vous communiquer l’explication que je lui ai donné sur ce dernier point). D’autre part, 345 est non seulement le nombre d’El-Shaddaï, mais aussi celui de ha-Shem (le Nom), ainsi que de Mesheh, la forme hébraïque du nom de Moïse, qui est d’ailleurs le retournement exact de ha-Shem. »

Aperçus sur l’Initiation, chap. XLIII - Sur la notion de l’Élite :
« Dans la tradition islamique, El-Mustafâ, « l’Élu », est un des noms du Prophète ; quand ce mot est ainsi employé « par excellence », il se rapporte donc effectivement à l’« Homme Universel ».

Initiation et Réalisation spirituelle, chap. XXX - L’esprit est-il dans le corps ou le corps dans l’esprit ? :
« Dans la tradition islamique, le Prophète est à la fois « le premier de la création de Dieu » (awwal Khalqi’Llah) quant à sa réalité principielle (en-nûr el-mohammedî), et « le sceau (c’est-à-dire le dernier) des envoyés de Dieu » (Khâtam rusuli’Llah) quant à sa manifestation terrestre ; il est ainsi « le premier et le dernier » (el-awwal wa el-akher) par rapport à la création (bin-nisbati lil-Khalq), de même qu’Allah est « le Premier et le Dernier » au sens absolu (mutlaqan). »

Le Symbolisme de la Croix, chap. III - Le symbolisme métaphysique de la Croix :
« Lorsque l’homme, dans le « degré universel », s’exalte vers le sublime, lorsque surgissent en lui les autres degrés (états non-humains) en parfait épanouissement, il est l’« Homme Universel ». L’exaltation ainsi que l’ampleur ont atteint leur plénitude dans le Prophète (qui est ainsi identique à l’« Homme Universel ») » (Épître sur la Manifestation du Prophète, par le Sheikh Mohammed ibn Fadlallah El-Hindi). – Ceci permet de comprendre cette parole qui fut prononcée, il y a une vingtaine d’années, par un personnage occupant alors dans l’Islam, même au simple point de vue exotérique, un rang fort élevé : « Si les Chrétiens ont le signe de la croix, les Musulmans en ont la doctrine. » Nous ajouterons que, dans l’ordre ésotérique, le rapport de l’« Homme Universel » avec le Verbe d’une part et avec le Prophète d’autre part ne laisse subsister, quant au fond même de la doctrine, aucune divergence réelle entre le Christianisme et l’Islam, entendus l’un et l’autre dans leur véritable signification. »

Initiation et Réalisation spirituelle, chap. XXXI - Les deux nuits :
« Dans la tradition islamique, les deux « nuits » dont nous avons parlé sont représentées respectivement par laylatul-qadr et laylatul-mirâj, correspondant à un double mouvement « descendant » et « ascendant » : la seconde est l’ascension nocturne du Prophète, c’est-à-dire un retour au Principe à travers les différents « cieux » qui sont les états supérieurs de l’être ; quant à la première, c’est la nuit où s’accomplit la descente du Qorân, et cette « nuit », suivant le commentaire de Mohyiddin ibn Arabi, s’identifie au corps même du Prophète. Ce qui est particulièrement à remarquer ici, c’est que la « révélation » est reçue, non dans le mental, mais dans le corps de l’être qui est « missionné » pour exprimer le Principe : Et Verbum caro factum est, dit aussi l’Évangile (caro et non pas meus), et c’est là, très exactement, une autre expression, sous la forme propre à la tradition chrétienne, de ce que représente laylatul-qadr dans la tradition islamique. »

Articles et Comptes Rendus, Tome 1, Le Soufisme :
« Quant à l’origine du « Soufisme », au sens habituel de ce mot, nous sommes entièrement d’accord avec l’auteur pour penser qu’elle est proprement islamique et procède directement de l’enseignement même du Prophète, à qui remonte en définitive toute silsilah authentique. »

Aperçus sur l’Ésotérisme islamique et le Taoïsme, chap. I - L’ésotérisme islamique :
« En tout cas, et ceci doit suffire à trancher la question pour quiconque ne l’envisage pas simplement « de l’extérieur », la tradition indique expressément que l’ésotérisme, aussi bien que l’exotérisme, procède directement de l’enseignement même du Prophète, et, en fait, toute tariqah authentique et régulière possède une silsilah ou « chaîne » de transmission initiatique remontant toujours en définitive à celui-ci à travers un plus ou moins grand nombre d’intermédiaires. Même si, par la suite, certaines turuq ont réellement « emprunté », et mieux vaudrait dire « adapté », quelques détails de leurs méthodes particulières (quoique, ici encore, les similitudes puissent tout aussi bien s’expliquer par la possession des mêmes connaissances, notamment en ce qui concerne la « science du rythme » dans ses différentes branches), cela n’a qu’une importance bien secondaire et n’affecte en rien l’essentiel. »

Voile d’Isis, 1929. C.R. du livre de J. A. de Gobineau, Les religions et les philosophies dans l’Asie centrale :
« Pour ce qui est du Soufisme, c’est-à-dire de l’ésotérisme musulman, il existe tout aussi bien chez les Arabes que chez les Persans, et, en dépit de toutes les assertions des « critiques » européens, il se rattache aux origines mêmes de l’Islam : il est dit, en effet, que le Prophète enseigna la « science secrète » à Abou-Bekr et à Ali, et c’est de ceux-ci que procèdent les différentes écoles. »

Lettre à Guido Di Giorgio, Le Caire, 22 mars 1936 :
« Pour la question de Dante et du Prophète, je vois plutôt là une apparente concession aux conceptions admise exotériquement, comme dans le cas du Zohar où le Christ est traité de la même façon ; et les remarques que vous faites à ce propos paraissent bien encore le confirmer. Il est certain qu’il y a eu dans les rapports de la Chrétienté et de l’Islam des choses bien extraordinaires, et qui sont très mal connues. Les Arabes sont restés en Provence, dans les Alpes, etc., au moins jusqu’au XIe siècle, mais l’histoire écrite par les Européens le cache soigneusement ; mais de nombreux noms d’origine arabe (noms de lieux et noms de personnes) restent toujours, en France aussi bien qu’en Italie ; je vous citerai seulement comme exemple la rivière appelée Ain (source), qui a donné son nom à un département dont le chef lieu est Bourg (tour ou forteresse)… »

Lettre à Guido Di Giorgio, 9 septembre 1938 :
« Ce que Taillard vous avait écrit me paraît bien dans l’ensemble, et d’ailleurs il ne peut en être autrement pour ce qui est tiré du commentaire de Mohyiddin. La « jonction des deux arcs » et le « barzakh » entre El-Haqq et El-Khalq ; il ne semble pas en effet qu’il puisse y avoir de doute là-dessus. À part ce point, le reste de la traduction que vous citez du passage de la sûrat En-Najm est en somme correct, sauf pourtant que « ufuq » ne signifie pas sphère, mais horizon ; le « doué de vigueur », ou plus littéralement le « puissant en force » [shadîdu-l-quwâ], est généralement interprété comme désignant Jibrâîl. Dans le Prophète, l’état de walî peut être dit le plus élevé en ce sens qu’il est celui qui est tourné vers El-Haqq, tandis que celui de prophète est tourné vers El-Khalq ; mais la réunion de ces deux aspects est plus complète qu’un seul des deux, fût-il le plus élevé. On peut dire encore que la fonction de prophète (et à plus forte raison de rasûl) implique une extériorisation qui est en quelque sorte une « redescente », et qui, comme telle, peut être regardée comme un sacrifice (bien qu’en réalité elle n’affecte pas l’état purement intérieur de l’être) ; mais cette « redescente » même est nécessaire pour que la réalisation soit véritablement universelle et totale. – Il serait facile de faire ici une comparaison avec l’état du Pratyêka-Buddha et celui du Bodhisattwa, car le rapport est assez semblable (en tenant compte naturellement de la différence des points de vue propres aux deux doctrines). »

Symboles fondamentaux de la Science sacrée, chap. XLV - « El-Arkân » :
« Dans la tradition islamique, on trouve aussi une figure semblablement disposée, comprenant le nom du Prophète au centre et ceux des quatre premiers Kholafâ aux angles ; ici encore, le Prophète, apparaissant comme rukn el-arkân, doit être considéré, de la même façon que le Christ dans la figuration précédente, comme se situant à un niveau autre que celui de la base, et, par conséquent, il correspond aussi en réalité à la « pierre angulaire » du sommet. »

Aperçus sur l’Ésotérisme islamique et le Taoïsme, chap. V - Er-Rûh :
« Dans certaines formules ésotériques, le nom d’Er-Rûh est associé à ceux de quatre anges par rapport auxquels il est, dans l’ordre céleste, ce qu’est, dans l’ordre terrestre, le Prophète par rapport aux quatre premiers Kholafâ ; cela convient bien à Mitatrûn, qui d’ailleurs s’identifie ainsi nettement à Er-Rûh el-mohammediyah. »

Aperçus sur l’Ésotérisme islamique et le Taoïsme, chap. V - Er-Rûh :
« Une autre considération qui concorde entièrement avec cette autre interprétation est celle-ci : dans la figuration du « Trône » (El-Arsh), Er-Rûh est placé au centre, et cette place est effectivement celle de Metatron ; le « Trône » est le lieu de la « Présence divine », c’est-à-dire de la Shekinah qui, dans la tradition hébraïque, est la « parèdre » ou l’aspect complémentaire de Metatron. D’ailleurs, on peut même dire que, d’une certaine façon, Er-Rûh s’identifie au « Trône » même, car celui-ci, entourant et enveloppant tous les mondes (d’où l’épithète El-Muhît qui lui est donnée), coïncide par là avec la « circonférence première » dont nous avons parlé plus haut (1). On retrouve encore ici les deux faces du barzakh : du côté d’El-Haqq, c’est Er-Rahmân qui repose sur le « Trône » (2) ; mais, du côté d’el-Khalq, il n’apparaît en quelque sorte que par réfraction à travers Er-Rûh, ce qui est en connexion directe avec le sens de ce hadîth : « Celui qui me voit, celui-là voit la Vérité » (man raanî faqad raa el-Haqq). C’est là, en effet, le mystère de la manifestation « prophétique » (3) ; et l’on sait que suivant la tradition hébraïque également, Metatron est l’agent des « théophanies » et le principe même de la prophétie (4), ce qui, exprimé en langage islamique, revient à dire qu’il n’est autre qu’Er-Rûh el-mohammediyah, en qui tous les prophètes et les envoyés divins ne sont qu’un, et qui a, dans le « monde d’en bas », son expression ultime dans celui qui est leur « sceau » (Khâtam el-anbiâï wa’l-mursalîn), c’est-à-dire qui les réunit en une synthèse finale qui est le reflet de leur unité principielle dans le « monde d’en-haut » (où il est awwal Khalqi’ Llah, ce qui est le dernier dans l’ordre manifesté étant analogiquement le premier dans l’ordre principiel), et qui est ainsi le « seigneur des premiers et des derniers » (seyid el-awwalîna wal’akhirîn). C’est par là, et par là seulement, que peuvent réellement être compris, dans leur sens profond, tous les noms et les titres du Prophète, qui sont en définitive ceux-même de l’« Homme universel » (El-Insân el-Kâmil), totalisant finalement en lui tous les degrés de l’Existence, comme il les contenait tous en lui dès l’origine : alayhi çalatu Rabbil-Arshi dawman, « que sur lui la prière du Seigneur du Trône soit perpétuellement » ! »
Notes : (1) Sur ce sujet du « Trône » et du Metatron, envisagé au point de vue de la Kabbale et de l’angélologie hébraïques, cf. Basilide, Notes sur le monde céleste (numéro de juillet 1934, p. 274-275), et Les Anges (numéro de février 1935, p. 88-70). - (2) Suivant ce verset de la Sûrat Tahâ (XX, 5) : « Er-Rahmânu alal‘arshi estawâ ». - (3) On peut remarquer que par là se rejoignent d’une certaine façon la conception du Prophète et celle de l’Avatâra, qui procèdent en sens inverse l’une de l’autre, la seconde partant de la considération du principe qui se manifeste, tandis que la première part de celle du « support » de cette manifestation (et le « Trône » est aussi le « support » de la divinité). - (4) Cf. Le Roi du Monde, p. 30-33. »

L’Homme et son Devenir selon le Vêdânta, chap. XXIV - Vidêha-mukti et jîvan-mukti :
« D’autre part, nous trouvons aussi dans la tradition extrême-orientale une théorie qui équivaut exactement à celle que nous venons d’exposer : cette théorie est celle des « quatre Bonheurs », dont les deux premiers sont la « Longévité », qui, nous l’avons déjà dit, n’est pas autre chose que la perpétuité de l’existence individuelle, et la « Postérité », qui consiste dans les prolongements indéfinis de l’individu à travers toutes ses modalités. Ces deux « Bonheurs » ne concernent donc que l’extension de l’individualité, et ils se résument dans la restauration de l’« état primordial », qui en implique le plein achèvement ; les deux suivants, qui se rapportent au contraire aux états supérieurs et extra-individuels de l’être (C’est pourquoi, tandis que les deux premiers « Bonheurs » appartiennent au domaine du Confucianisme, les deux autres relèvent de celui du Taoïsme), sont le « Grand Savoir » et la « Parfaite Solitude », c’est-à-dire pânditya et mauna. Enfin, ces « quatre Bonheurs » obtiennent leur plénitude dans le « cinquième », qui les contient tous en principe et les unit synthétiquement dans leur essence unique et indivisible ; ce « cinquième Bonheur » n’est point nommé (non plus que le « quatrième état » de la Mândûkya Upanishad), étant inexprimable et ne pouvant être l’objet d’aucune connaissance distinctive ; mais il est facile de comprendre que ce dont il s’agit ici n’est autre que l’Union même ou l’« Identité Suprême », obtenue dans et par la réalisation complète et totale de ce que d’autres traditions appellent l’« Homme Universel », car le Yogî, au vrai sens de ce mot, ou l’« homme transcendant » (tchen-jen / cheun-jen) du Taoïsme, est aussi identique à l’« Homme Universel » (1). » Note : « (1) Cette identité est pareillement affirmée dans les théories de l’ésotérisme islamique sur la « manifestation du Prophète ». »

L’Ésotérisme de Dante, chap. V - Voyages extra-terrestres dans différentes traditions :
« Mort et descente aux Enfers d’un côté, résurrection et ascension aux Cieux de l’autre, ce sont comme deux phases inverses et complémentaires, dont la première est la préparation nécessaire de la seconde, et que l’on retrouverait également sans peine dans la description du « Grand Œuvre » hermétique ; et la même chose est nettement affirmée dans toutes les doctrines traditionnelles. C’est ainsi que, dans l’Islam, nous rencontrons l’épisode du « voyage nocturne » de Mohammed, comprenant pareillement la descente aux régions infernales (isrâ), puis l’ascension dans les divers paradis ou sphères célestes (mirâj) ; et certaines relations de ce « voyage nocturne » présentent avec le poème de Dante des similitudes particulièrement frappantes, à tel point que quelques-uns ont voulu y voir une des sources principales de son inspiration. Don Miguel Asîn Palacios a montré les multiples rapports qui existent, pour le fond et même pour la forme, entre la Divine Comédie (sans parler de certains passages de la Vita Nuova et du Convito), d’une part, et d’autre part, le Kitâb el-isrâ (Livre du Voyage nocturne) et les Futûhât el-Mekkiyah (Révélations de la Mecque) de Mohyiddin ibn Arabi, ouvrages antérieurs de quatre-vingts ans environ, et il conclut que ces analogies sont plus nombreuses à elles seules que toutes celles que les commentateurs sont parvenus à établir entre l’œuvre de Dante et toutes les autres littératures de tout pays (1). En voici quelques exemples : « Dans une adaptation de la légende musulmane, un loup et un lion barrent la route au pèlerin, comme la panthère, le lion et la louve font reculer Dante… Virgile est envoyé à Dante et Gabriel à Mohammed par le Ciel ; tous deux, durant le voyage, satisfont à la curiosité du pèlerin. L’Enfer est annoncé dans les deux légendes par des signes identiques : tumulte violent et confus, rafale de feu… L’architecture de l’Enfer dantesque est calquée sur celle de l’Enfer musulman : tous deux sont un gigantesque entonnoir formé par une série d’étages, de degrés ou de marches circulaires qui descendent graduellement jusqu’au fond de la terre ; chacun d’eux recèle une catégorie de pécheurs, dont la culpabilité et la peine s’aggravent à mesure qu’ils habitent un cercle plus enfoncé. Chaque étage se subdivise en différents autres, affectés à des catégories variées de pécheurs ; enfin, ces deux Enfers sont situés tous les deux sous la ville de Jérusalem… Afin de se purifier au sortir de l’Enfer et de pouvoir s’élever vers le Paradis, Dante se soumet à une triple ablution. Une même triple ablution purifie les âmes dans la légende musulmane : avant de pénétrer dans le Ciel, elles sont plongées successivement dans les eaux des trois rivières qui fertilisent le jardin d’Abraham… L’architecture des sphères célestes à travers lesquelles s’accomplit l’ascension est identique dans les deux légendes ; dans les neuf cieux sont disposées, suivant leurs mérites respectifs, les âmes bienheureuses qui, à la fin, se rassemblent toutes dans l’Empyrée ou dernière sphère… De même que Béatrice s’efface devant saint Bernard pour guider Dante dans les ultimes étapes, de même Gabriel abandonne Mohammed près du trône de Dieu où il sera attiré par une guirlande lumineuse… L’apothéose finale des deux ascensions est la même : les deux voyageurs, élevés jusqu’à la présence de Dieu, nous décrivent Dieu comme un foyer de lumière intense, entouré de neuf cercles concentriques formés par les files serrées d’innombrables esprits angéliques qui émettent des rayons lumineux ; une des files circulaires les plus proches du foyer est celle des Chérubins ; chaque cercle entoure le cercle immédiatement inférieur, et tous les neuf tournent sans trêve autour du centre divin… Les étages infernaux, les cieux astronomiques, les cercles de la rose mystique, les chœurs angéliques qui entourent le foyer de la lumière divine, les trois cercles symbolisant la trinité de personnes, sont empruntés mot pour mot par le poète florentin à Mohyiddin ibn Arabi (2). De telles coïncidences, jusque dans des détails extrêmement précis, ne peuvent être accidentelles, et nous avons bien des raisons d’admettre que Dante s’est effectivement inspiré, pour une part assez importante, des écrits de Mohyiddin ; mais comment les a-t-il connus ? On envisage comme intermédiaire possible Brunetto Latini, qui avait séjourné en Espagne ; mais cette hypothèse nous paraît peu satisfaisante. Moyiddin était né à Murcie, d’où son surnom d’El-Andalûsi, mais il ne passa pas toute sa vie en Espagne, et il mourut à Damas ; d’un autre côté, ses disciples étaient répandus dans tout le monde islamique, mais surtout en Syrie et en Égypte, et enfin il est peu probable que ses œuvres aient été dès lors dans le domaine public, où même certaines d’entre elles n’ont jamais été. En effet, Mohyiddin fut tout autre chose que le « poète mystique » qu’imagine M. Asîn Palacios ; ce qu’il convient de dire ici c’est que, dans l’ésotérisme islamique, il est appelé Esh-Sheikh el-akbar, c’est-à-dire le plus grand des Maîtres spirituels, le Maître par excellence, que sa doctrine est d’essence purement métaphysique, et que plusieurs des principaux Ordres initiatiques de l’Islam, parmi ceux qui sont les plus élevés et les plus fermés en même temps, procèdent de lui directement. Nous avons déjà indiqué que de telles organisations furent au XIIIe siècle, c’est-à-dire à l’époque même de Mohyiddin, en relations avec les Ordres de chevalerie, et, pour nous, c’est par là que s’explique la transmission constatée ; s’il en était autrement, et si Dante avait connu Mohyiddin par des voies « profanes », pourquoi ne l’aurait-il jamais nommé, aussi bien qu’il nomme les philosophes exotériques de l’Islam, Avicenne et Averroès (3) ? De plus, il est reconnu qu’il y eut des influences islamiques aux origines du Rosicrucianisme, et c’est à cela que font allusion les voyages supposés de Christian Rosenkreuz en Orient ; mais l’origine réelle du Rosicrucianisme, nous l’avons déjà dit, ce sont précisément les Ordres de chevalerie, et ce sont eux qui formèrent, au moyen âge, le véritable lien intellectuel entre l’Orient et l’Occident. »
Notes : « (1) Miguel Asin Palacios. La Escatologia musulmana en la Divina Comedia, Madrid, 1919. – Cf. Blochet, Les Sources orientales de la « Divine Comédie », Paris, 1901. (2) A. Cabaton, « la Divine Comédie » et l’Islam, dans la Revue de l’Histoire des Religions, 1920 ; cet article contient un résumé du travail de M. Asîn Palacios. (3) Inferno, IV, 143-144. »

Lettre à un à un docteur, Le Caire, 2 juin 1936 :
« Il est bien exact que l’état grossier ne représente qu’une modalité, et non l’intégralité d’un degré d’existence ; mais on peut cependant envisager aussi un « centre » pour cette modalité, car l’analogie s’applique à tous les degrés ; suivant la parole du Prophète, « Toute chose a un cœure. - D’autre part, il est évident que la manifestation grossière ne pourrait même pas exister sans des éléments subtils, de même que la manifestation subtile, à son tour, n’existerait pas sans principe non-manifesté ; c’est là, en somme, une question de hiérarchie « causale » à observer... »

Formes traditionnelles et Cycles cosmiques, Quelques remarques sur le nom d’Adam :
« Dans tous les cas, les discussions auxquelles cette question a donné lieu apparaissent comme assez vaines, car il ne devrait y avoir là aucune difficulté ; en fait, il n’y en a pas, tout au moins, pour la tradition islamique, dans laquelle il existe un hadîth (parole du Prophète) disant que, « avant l’Adam que nous connaissons, Dieu créa cent mille Adam » (c’est-à-dire un nombre indéterminé), ce qui est une affirmation aussi nette que possible de la multiplicité de périodes cycliques et des humanités correspondantes. »

Le Symbolisme de la Croix, chap. VIII - La guerre et la paix :
« Cette conception ne se trouve pas seulement dans la doctrine hindoue, mais aussi dans la doctrine islamique, car tel est exactement le sens réel de la « guerre sainte » (jihâd) ; l’application sociale et extérieure n’est que secondaire, et ce qui le montre bien, c’est qu’elle constitue seulement la « petite guerre sainte » (El-jihâdul-açghar), tandis que la « grande guerre sainte » (El-jihâdul-akbar) est d’ordre purement intérieur et spirituel (1). » Note : « (1) Ceci repose sur un hadîth du Prophète qui, au retour d’une expédition, prononça cette parole : « Nous sommes revenus de la petite guerre sainte à la grande guerre sainte » (rajanâ min el-jihâdil-açghar ilâ el-jihâdil-akbar). »


[Wa sallâ-Llâhu 'alâ Habîbi-Hi Muhammadin wa âlihi wa ashâbihi wa sallam.]
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